Energie Jeune : Pourquoi nous refusons de participer à cette opération ?

Contribution au débat de militantes SUD éducation du collège Versailles
vendredi 2 octobre 2015
par  GUERDA
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Participer à cette opération n’a rien d’obligatoire et même si, à première vue, le message délivré aux élèves peut sembler en accord avec le discours des enseignants, les enjeux de ces initiatives sont beaucoup plus importants.

En effet, Energie Jeunes est une association crée en 2009 pour contribuer à la prévention du décrochage scolaire dans les quartiers les moins favorisés. Elle est financée par des entreprises publiques (Académies de l’EN de différentes régions, Service civique), et des entreprises privées (EDF, Manpower, Nestlé, Orange, Loréal, HSBC...)

Cette association intervient pendant 3 heures dans les classes, avec des objectifs différents pour chaque niveau : « Prendre de bonnes habitudes » (6eme), « Progresser chaque jour » (5eme), « résister au découragement » (4eme), « Faire les choses à fond » (3eme).

1) Cela perturbe t-il les enseignements ?

Cette intervention se fait sur des heures de cours, pour des contenus qui sont déjà abordés en vie de classe avec les professeurs principaux, par des projets élaborés par les CPE, l’infirmière, ou encore par le travail quotidien d’un grand nombre de personnel de l’établissement.

2) Est-il si grave qu’une association intervienne sur cette question ?

Prévenir au décrochage scolaire est une des principales missions des CPE. Les CPE ont été formé et ont une expérience quotidienne de cette problématique. Or dans notre collège, nous avons perdu l’année ½ poste de CPE. En faisant intervenir Energie Jeunes dans nos classes, on ne fait qu’entériner la perte de ce demi poste, nos CPE actuels n’ayant plus le temps de mener des actions de fond sur le thème du décrochage scolaire.

De plus dans notre collège, les causes du décrochage scolaire ont souvent une origine plus profonde qu’un manque de volonté. Lutter contre le décrochage scolaire nécessite un travail régulier et sur le long terme avec l’élève et sa famille

3) Quelle est la légitimité de ces personnes ?

L’association Energie Jeunes affirme que des enseignants aident « à améliorer les programmes et dispositifs pédagogiques ». En effet, les personnes qui interviennent ne sont pas pédagogues. Ce sont des salariés actifs en entreprise, des bénévoles travailleurs ou retraités... Nous pensons que des professeurs formés, expérimentés, qui ont un suivi à long terme des élèves et une vraie connaissance des quartiers difficiles sont plus légitimes pour mener ce genre d’action.

4) Quelle idéologie est véhiculée par cette association ?

Celle de l’individualisme, du mérite, de la volonté personnelle. Nous n’appelons pas cela de la pédagogie mais du management. Nous pensons que notre mission de professeur est de promouvoir l’entraide, la solidarité, mais aussi de contribuer au développement de l’élève par le savoir et la culture.

5) Est-il si grave que ce soit des entreprises privées qui financent cette association ?

Nous pensons que oui. De plus en plus, le secteur privé devient un acteur dans le financement de l’école publique, et de fait dans l’orientation idéologique de celle ci. D’autres exemples peuvent être cités : BNP qui financent les voyages scolaires en région parisien (c’est ça ou rien...) Leclerc qui organise une opération « Nettoyons la nature » avec des collégiens.... D’une part, nous pensons que la neutralité de l’école (qui doit être, rappelons le, à l’égard des religions, mais aussi du monde économique) n’est pas garantie. D’autre part, ces actions ne peuvent qu’encourager le retrait de l’Etat de l’enseignement public. Il est évidement beaucoup plus économique de subventionner une association pour faire une intervention sur le décrochage scolaire que de financer un poste de CPE....

6) Et les objectifs de l’école dans tout ça ?

Avec la mise en place de tels projets nous sommes en train de privatiser les objectifs de l’école.

Le message véhiculé par les vidéos peut laisser entendre que la réussite personnelle ne passe que par la réussite professionnelle.