STOP AUX VIOLENCES INSTITUTIONNELLES ET AU RACISME D’ETAT !

vendredi 3 mars 2017
par  Pilotin
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L’affaire Théo a vu le jour le 2 février 2017 dans le quartier de la Rose-des-vents, à Aulnay-sous-Bois. Suite à une intervention policière qui dérape, le jeune Théo Luhaka est hospitalisé ; diagnostic : une plaie longitudinale de 10 centimètres du canal anal et une section du muscle sphinctérien causées par une ma-traque télescopique. Cette blessure extrêmement grave lui vaut 60 jours d’ITT avec des séquelles physiques et psychologiques encore inquantifiables.

Dans les jours qui suivent, on assiste dans les médias à une série de tentatives d’atténuation voire de pure et simple négation de la réalité des faits : " arrestation violente" ou " brutale" , "interpellation musclée", "jeune homme grièvement blessé", "intervention virile"... jusqu’à l’IGPN qui conteste le terme de “viol" au motif qu’il n’y avait pas intention sexuelle mais seulement acte d’humiliation. Tout se passe comme si l’on avait affaire à un accident malencontreux, alors même que le Parquet requalifie les faits et que l’un des quatre policiers est mis en examen pour viol.

Depuis lors, les témoignages d’humiliation à caractère sexuel et raciste se sont multipliés, montrant le caractère répété de ces pratiques dans les quartiers dits sensibles. La cible en est toujours ou presque toujours les immigréEs ou enfants d’immigréEs originaires de pays, autre-fois colonisés qui, en raison de leur lieu de rési-dence, font l’objet d’une surveillance accrue et d’un traitement ciblé de la part de l’Etat et de ses agents. Contrôles immotivés, palpations, injures, coups : toujours sujettEs à soupçon, les habitantEs de ces quartiers ne sont pas considéréEs comme le reste des citoyennEs par la police. À plus forte raison quand on sait que les forces de l’ordre ne sont qu’exceptionnellement condamnées pour ces faits et que les victimes sont rarement reconnues comme telles : la loi ne s’applique pas de la même manière sur tous les territoires.

En agissant de la sorte, l’État confère à ces FrançaisEs des quartiers populaires un statut d’exception qui peut rappeler celui de l’indigénat. Comment ne peut-on pas faire le lien entre ces violences systémiques et le tropisme post-colonial de l’État français ? Combien de temps allons-nous encore fermer les yeux sur cette structure aveugle qui autorise les pratiques discriminatoires en toute légalité ? Lorsqu’un délégué du syndicat Unité SGP Police estime en public que le terme de "bamboula" est "une insulte à peu près convenable", lorsqu’il est avéré que les policiers et militaires sont à 51,5 % en faveur du FN, il devient clair qu’un racisme structurel est à l’œuvre dans l’exercice de la force publique, celle-là même qui est censée garantir la sécurité de toustEs, le "vivre ensemble" et la concorde sociale.

Comme si cela ne suffisait pas, l’agression ra-ciste de Théo Luhaka revêt un caractère d’humiliation homophobe et sexiste ancré dans les sarcasmes virilistes dont sont apparemment coutumiers ces "gardiens de la paix". Le commissariat d’Aulnay semble avoir manifesté une triste tradition de violences et d’injures en ce sens : ces comportements inacceptables doivent être bannis de la police.

Les attentats de 2015 et 2016 ont été prétexte -via l’État d’urgence- à une militarisation de l’espace public et à une remise en cause sans précédent des libertés fondamentales. Celles des musulmanEs de France et des populations racisées tout d’abord, puis plus largement de toustEs ceullEs qui, dans les manifestations et dans la rue, voulaient faire usage de leur liberté. Fait notable, le rapport annuel d’Amnesty International publié le 23 février 2017 pointe cette année la France pour ses abus liés à l’État d’urgence.

Plus récemment, l’assouplissement des règles relatives à l’usage des armes à feu par les policiers aggrave encore cette dérive d’un État policier qui, d’un côté va au chevet de ses victimes, de l’autre met en péril les droits fondamentaux en se proposant d’élargir le droit de tuer concédé aux forces de l’ordre. Au lieu de revenir à une police de prévention et de proximité, on veut aujourd’hui militariser ses prérogatives en les alignant sur celles de la gendarmerie. S’agirait-il de faire la guerre aux quartiers populaires ?

En tant que syndicat de lutte, Sud éducation 13 soutient toustEs les victimes de violences policières et en appelle à une justice équitable. Il n’y aura pas de justice sociale sans justice tout court, il ne peut y avoir de lutte de classe sans combat antiraciste. Nous soutenons la révolte bien compréhensible qui s’est exprimée dans les banlieues et nous en appelons à l’amnistie de toustEs les manifestantEs.

Nous condamnons les violences policières et l’impunité de leurs auteurs qui s’apparente à un permis de tuer. Nous condamnons la répression qui s’est abattue sur la famille d’Adama Traoré, sur les manifestantEs de Bobigny ou d’ailleurs et plus récemment sur les lycéennEs mobiliséEs en soutien à Théo le jeudi 23 février, faisant 21 interpelléEs pour la seule Région parisienne.

Pour que l’iniquité ne succède pas à la brutalité, nous invitons à une mobilisation large sur toutes les manifestations de soutien à Théo et aux victimes de violences policières.


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