REP 1/3 : Une amélioration des conditions de travail ?

Notre dossier sur la "refondation" de l’Education prioritaire
jeudi 18 décembre 2014
par  GUERDA
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La réduction du temps de travail des enseignants des zones d’Education prioritaire était une mesure phare mise en avant par V. Peillon lors de l’annonce de la réforme en janvier dernier. Dans la réalité la situation est loin d’être aussi idyllique que ce que le ministère veut bien nous faire croire.


Dans le secondaire arnaque sur les pondérations !

Au niveau du second degré dans les 100 établissements REP+ préfigurateurs à la rentrée 2014, une pondération de 1,1 est mise en place sur les heures d’enseignement. Cela signifie concrètement qu’un certifié effectuant un service complet de 18h devant élèves devra désormais enseigner 16h30 pour atteindre ses maxima de service. D’après les textes cette pondération est censée être une reconnaissance du travail déjà effectué en plus des heures d’enseignement dans les établissements placés en Education prioritaire : concertation, suivi des élèves, relation avec la famille, élaboration de projet.

Si la réduction du temps de travail est une revendication de longue date pour plusieurs organisations syndicales - dont la notre - dans la pratique la mise en place de cette mesure est pourtant bien loin de répondre à nos attentes.

Dans la plupart des collèges concernés on constate en effet, que les directions (avec l’aval du rectorat ?) considèrent que le temps de travail devant élève dont on nous a déchargé reste du à l’établissement. C’est ce qui justifie, selon elles, l’organisation de réunions de concertation obligatoires dont les chefs d’établissement orientent le plus souvent les contenus de manière autoritaire et artificiel.

Il s’agit là d’une interprétation parfaitement erronée des textes et en complète contradiction avec les annonces gouvernementales. La circulaire concernant la refondation de l’éducation prioritaire, paru le 5 juin 2014 est pourtant claire :

« Ces textes prévoient, en Rep+, un dispositif de pondération des heures d’enseignement des enseignants du second degré reconnaissant le temps consacré au travail en équipe nécessaire à l’organisation de la prise en charge des besoins particuliers des élèves qui y sont scolarisés, aux actions correspondantes ainsi qu’aux relations avec les parents d’élèves et à la formation. Chaque heure assurée dans ces établissements est décomptée pour la valeur d’1,1 heure pour le calcul de ses maxima de service. Sans avoir vocation à se traduire par une comptabilisation, ce dispositif vise à favoriser le travail en équipe de classe ou disciplinaire, en équipe pluri-professionnelle... »

Cette réduction du temps de travail permet donc de favoriser la concertation mais ne la rend en aucun cas obligatoire. Les Ventiliations des Services (VS) qui ont été soumises à nos signatures confirment logiquement cette disposition puisque le temps de concertation n’y apparaît nullement et n’a donc aucun statut légal.

Jusqu’à ce jour et de l’aveu même des chefs d’établissements, aucune note de service n’a été portée à notre connaissance pour infirmer ou clarifier les textes de lois mis à notre disposition concernant la mise en place des réseaux Rep+. De la même façon, aucun document ne fait état d’une quelconque comptabilisation du temps de concertation.

La très grande diversité constatée dans la mises en application de cette réforme de l’Education prioritaire dans les différents établissements concernés finit de nous convaincre de l’absence de cadrage légal à ce sujet.

Ainsi dans certains collèges une heure commune à tous les enseignants est inscrite dans les emplois du temps. Parfois même les 30 minutes restantes sont comptabilisées et servent à alimenter un compte dans lequel piocher pour des temps de concertation ultérieures. Ailleurs l’annualisation de ces 1h30 est prévu pour participer au conseil école-collège. Mais là ou le rapport de force est suffisant aucune réunion ne sont imposés aux collègues. Dans les faits donc, la réalisation de cette pondération entraine des situations forts différentes d’un établissement à l’autre et dans la grande majorité des cas cela se traduit par autant voir davantage de travail qu’avant.

Dans le premier degré, il n’y a pas de réduction du temps de travail prévu, mais une réduction du temps devant élèves, équivalente à 18 demi-journées consacrées à la formation et la concertation (soit 54 heures).

Nous dénonçons le fait d’utiliser les postes de brigade existants pour combler ces temps de formation plutôt que d’en créer de nouveaux nécessaires. Et nous sommes particulièrement contre le fait de faire appel aux nouveaux titulaires pour pourvoir ces postes aux conditions précaires (aucune prévision, ni stabilité dans l’affection sur ce type de remplacement).

Toujours autant d’heures sup’ !

Jusqu’à présent la pondération n’est appliquée que sur les heures comprises dans les maxima de service (18h pour un certifié). Les HSA ne sont donc pas comprises dans le dispositif, ce qui fait l’objet de contestations de la part de certaines organisations syndicales. SUD éducation Bouches-du-Rhône ne partage pas se point de vue car il nous semble contradictoire de défendre à la fois une baisse du temps de travail et de chercher à valoriser dans le même temps les heures supplémentaires. Selon nous seule l’heure sup imposée pour raison de service devrait faire l’objet d’une pondération puisqu’elle est dès lors assimilable aux maxima de service. Prendre des heures supplémentaires est généralement présenté par le ministère et les chefs d’établissements comme le moyen de revaloriser les salaires des enseignants, dans la réalité c’est surtout le moyen de faire des économies tout en dégradant nos conditions d’exercice. C’est un fait, les enseignants Français sont parmi les plus mal payés d’Europe et ce d’autant que depuis 1980, nous avons perdu 20% de notre « pouvoir d’achat ». Privilégier les solutions individuels pour pallier la faiblesse des salaires c’est donc une façon pour l’Etat de ne procéder à aucune revalorisation salariale collective.

Pas de baisse des effectifs

Dans le même sens la politique des heures supplémentaires dédouane l’Etat d’un recrutement plus important en terme d’enseignants, tout en alourdissant considérablement notre charge de travail. Nombreux parmi nous sont ceux qui réclament un allégement des effectifs par classe, c’est particulièrement le cas en zone d’éducation prioritaire où le nombre d’élève ne nous permet pas de répondre correctement aux difficultés de chacun. Malgré l’annonce de la création de 60 000 postes sur 5 ans, la situation ne s’inversera pas. En effet le rapport remis à Benoît Hamon en juillet dernier par la Direction Générale des Affaires Scolaires (DEGESCO) et rendu public par Médiapart présente des conclusions plutôt alarmantes. Selon ce « dossier ministre », les créations de postes ne permettrons pas de compenser l’accroissement démographique et ne vont donc pas améliorer le ratio entre nombre d’enseignants et nombre d’élèves. Selon ce même rapport rien est prévu en terme de postes de surveillants, de CPE, d’infirmiers, etc. Pire encore d’après les rédacteurs l’objectif des 60 000 postes ne sera même pas atteint.

Saupoudrage dans le primaire

Dans les écoles désignées REP+ , pas de réduction du temps de travail prévu, mais une réduction du temps devant élèves, équivalente à 18 demi-journées consacrées à la formation et la concertation. Nous dénonçons le fait d’utiliser les postes de brigade existants pour combler ces temps de formation plutot que d’en créer de nouveaux nécessaires. Et nous sommes particulièrement contre le fait de faire appel aux nouveaux titulaires pour pourvoir ces postes aux conditions précaires (aucune prévision, ni stabilité dans l’affection sur ce type de remplacement).

Le dispositif « Plus de maîtres que de classe » annoncé aurait pour but de remédier à la difficulté scolaire avec des collègues enseignants non spécialisés alors que dans un même temps les réseaux RASED sont réduits à un taux misérable, avec des réseaux totalement délités et incomplets. Les maîtres G ont été totalement supprimés dans le département, les maîtres E ne sont plus renouvelés après départ à la retraite et l’envoi d’enseignants en formation ne fait pas partie des mesures annoncées en REP+, ni ailleurs… La mise en place des REP+ s’effectuant sans moyens supplémentaires, on ne voit pas très bien ce qui va changer réellement sur cette question du nombre d’enseignants par classe et pourrait apporter de plus au niveau de la remédiation à la difficulté scolaire. Pour atteindre cet objectif, il aurait fallu
commencer par réparer la casse des années précédentes en rétablissant notamment des RASED complets (postes E,G et psychologues scolaires) et pour cela, relancer la formation des maîtres spécialisés.

Dans l’immédiat, SUD éducation invite les collègues à agir collectivement pour :

> refuser tout obligation de présence en échange de la pondération
> refuser que les thématiques des concertations proposées soient imposées par la direction

Plus largement et pour échapper à cette logique de très court terme, il est donc impératif de lutter collectivement pour avoir la possibilité de travailler mieux, tous et autrement. C’est la raison pour laquelle SUD éducation revendique :


> une réelle politique de recrutement à la hauteur des besoins des équipes.
> la baisse des effectifs par classe
> une augmentation conséquente des salaires en commençant par les plus bas revenus

Si vous souhaitez plus d’infos sur cette refonte de l’Éducation prioritaire, vous pouvez télécharger notre dossier ci-dessous.


Documents joints

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