Ne livrons pas les élèves au Livret personnel de compétences !

L’évaluation par compétences, ou la soumission de l’éducation au marché du travail
jeudi 19 mai 2011
par  Rédac13014
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Dans le cadre de la mise en place du « Socle commun de connaissances et de compétences », qui forme le noyau de la Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’École du 23 avril 2005 (n°2005-380), un arrêté du 14 et une circulaire du 18 juin 2010 (n°2010-087) prétendent imposer désormais aux enseignant-es des classes de troisième la validation de livrets de compétences (LPC), qui aurait la « double fonction » d’« outil institutionnel attestant la maîtrise des sept compétences du socle commun » et d’« outil pédagogique au service du suivi personnalisé des élèves ».

Il s’agit d’évaluer sur le mode binaire l’acquisition par les collégiens de 98 items rangés sous sept « compétences-clés », elle-mêmes conçues comme des combinaisons « de connaissances, d’aptitudes et d’attitudes appropriées à une situation donnée ».

On reconnaît là les concepts-clés du management néolibéral, permettant aux DRH des entreprises, soumises depuis les années 80 aux aléas d’une gestion en flux tendus, de gérer les « ressources humaines » avec la plus grande parcimonie : ce n’est plus une qualification précise, appuyée sur un diplôme, qui intéresse les nouveaux esclavagistes, mais des compétences diverses (polyvalence), qui les autorisent, suivant les besoins de l’entreprise, à confier aux salariés les tâches les plus diverses, sous la menace permanente du licenciement (flexibilité).

L’entrée de l’évaluation par compétences à l’école n’est qu’un pas de plus de la mutation d’une école humaniste à une école qui forme à l’employabilité.

L’instauration du LPC, qui est la forme choisie par le gouvernement pour mettre en œuvre le programme éducatif de l’OCDE à la demande de l’Union européenne, répond donc en réalité aux seules exigences du patronat : ce qui est en ligne de mire, c’est tout simplement la suppression des grilles de qualification des conventions collectives.

Par ailleurs, le LPC est devenu subrepticement une application numérique depuis janvier 2010 : il peut maintenant rendre de menus services à la police, puisque les données personnelles qu’il contient — et qui relèvent purement et simplement du fichage — sont exportables sur n’importe quel fichier de n’importe quel service : la mobilisation des parents et des enseignant-es avaient permis que les compétences soient retirées des données enregistrées sur Base-Élève, elles reviennent par la fenêtre, grâce au LPC !

Sa mise en place est donc inadmissible, parce qu’elle poursuit des fins économiques et policières, qui sont absolument étrangères à notre conception de l’enseignement et de l’École publique

SUD éducation Bouches-du-Rhône appelle les enseignant-es à ne pas cautionner cette mystification qui ne servira aucunement l’intérêt des élèves et les équipes à se réunir pour discuter des meilleures modalités collectives : ne pas compléter les items ou mettre le maximum à chacun-e, et informer les parents.